Les organismes fédéraux de financement de la recherche que sont le CRSH, le CRSNG et les IRSC ont récemment fait paraitre une nouvelle politique sur le libre accès aux publications de recherche. Son objectif consiste à accroître l’accès aux résultats des travaux de recherche financés, ainsi que la diffusion et l’échange de ces résultats. Concrètement, le titulaire d’une subvention octroyée à partir du 1er mai 2015 devra s’assurer qu’un article qu’il publie dans une revue attestant de la rigueur des travaux menés (revue avec comité de lecture) soit accessible gratuitement dans les 12 mois suivant sa publication.
Il faut accueillir l’arrivée de cette politique de façon positive puisqu’elle contribuera à accentuer l’accessibilité aux résultats issus de la recherche à quiconque s’y intéresse. Il faut savoir qu’historiquement, plusieurs revues exigent des frais pour accéder aux articles publiés. Un tel mode d’accès payant renferme un paradoxe du fait qu’une proportion importante du processus de production des connaissances scientifiques est financée à partir de fonds publics. On peut alors se demander pourquoi on devrait défrayer d’autres coûts pour accéder à son produit.
Si l’on peut se réjouir de l’arrivée de la politique sur le libre accès des organismes fédéraux, il faut se rappeler que l’accessibilité des articles scientifiques ne rime pas systématiquement avec la compréhension de leurs résultats. Pour faire un pas de plus vers la démocratisation de la recherche, il importe aussi d’encourager les chercheurs à prendre part à des initiatives de vulgarisation de leurs travaux, que ce soit auprès de publics professionnels ou du grand public. Si des incitatifs et des moyens existent déjà à cette fin, et que certaines disciplines possèdent une tradition plus marquée que d’autres, il n’en demeure pas moins que, globalement, il s’agit d’une pratique qui est moins reconnue que les initiatives s’adressant en premier lieu aux spécialistes de la discipline concernée.
Pourtant, il y a là un enjeu crucial concernant la contribution sociale de la recherche. D’un point de vue macroscopique, s’il est indubitable que les sociétés qui investissent de façon importante en recherche sont « en santé », il n’est pas toujours aussi évident que les citoyens se sentent interpellés, dans leur individualité, par les résultats de la recherche. Un des motifs en cause est d’ordre linguistique. En effet, encore faut-il comprendre ce qui nous accessible. Or, le jargon spécialisé – s’il trouve sa pertinence au sein d’une communauté de chercheurs – a plutôt tendance à rebuter le profane et, ce faisant, à l’éloigner de la recherche; même s’il est concerné par le sujet. Dit autrement, une accessibilité imperméable au plan de la compréhension risque grandement de devenir caduque. Voilà pourquoi la nouvelle politique sur le libre accès, bien qu’elle soit un pas important, demeure… un pas. Vers un objectif davantage inclusif au plan social.
Stéphane Allaire
@ytsejamer
Université du Québec à Chicoutimi